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Trois tours pour observer la forêt qui respire

Une tour qui mesure les échanges d’énergie, d’eau et de CO₂ entre la forêt et l’atmosphère.

Cette tour mesure les échanges d’énergie, d’eau et de CO₂ entre la forêt et l’atmosphère. Elle fait partie d’un trio de tours installées dans des stades différents de croissance forestière. Grâce à des instruments de haute précision, elle aide à mieux comprendre comment la forêt respire, chauffe et transpire, même après une coupe. Un outil essentiel du projet de recherche Évap-eau du professeur François Anctil.

Saviez-vous que la Forêt Montmorency abrite trois tours à flux mesurant en continu les échanges d’énergie, d’eau et de dioxyde de carbone (CO₂) entre la forêt et l’atmosphère? Discrètement dressées au cœur des peuplements forestiers, ces infrastructures impressionnantes jouent un rôle central dans plusieurs projets de recherche de la FFGG, dont le plus récent : Évap-eau.

Dirigé par les professeurs François Anctil et Daniel Nadeau , du Département de génie civil et de génie des eaux, ce projet vise à approfondir notre compréhension hydrométéorologique de l’évaporation et de son rôle comme amplificateur des sécheresses dans le nord-est de l’Amérique, en particulier au Québec méridional, avec un accent sur les sécheresses estivales.

Trois tours, trois stades de croissance

Bien qu’elles remplissent une mission identique, les trois tours ont été installées dans des environnements très différents :

  • La tour Juvénile, dans un peuplement jeune, quelques dizaines années après une coupe forestière;
  • La tour Gaule, dans une forêt en croissance, où les arbres ont atteint une taille moyenne;
  • La tour Régénération, dans une zone récemment perturbée, en début de reprise végétale.

Cette diversité de contextes permet de comparer les flux d’énergie et de gaz à effet de serre selon l’âge et la structure des peuplements. «Comme les appareils doivent pour la plupart se trouver au-dessus de la végétation en présence, les trois structures érigées sont différentes pour atteindre la hauteur voulue», de dire le professionnel de recherche Pierre-Erik Isabelle, en charge des 3 tours à flux de la Forêt Montmorency.

Mesurer l’invisible

Grâce à des instruments de haute précision, les tours captent des données sur le rayonnement solaire, la température, l’humidité, le vent, la chaleur du sol, ainsi que les flux de chaleur sensible et latente et de CO2. Ces derniers sont mesurés à l’aide d’une méthode avancée appelée eddy covariance (ou covariance des tourbillons), qui permet de saisir au vol les minuscules mouvements d’air transportant chaleur, vapeur d’eau et autres gaz.

Une plateforme unique au monde

Des tours semblables existent ailleurs dans le monde (voir les réseaux AmeriFlux ou Fluxnet), mais notre installation se distingue par plusieurs aspects :

  • La continuité des mesures depuis 2015;
  • Sa mise en contexte dans une forêt boréale humide, un environnement rare dans les grands réseaux de flux;
  • L’étude parallèle de trois stades de développement forestier, un atout pour modéliser les impacts des coupes et des changements climatiques sur les bilans d’eau, d’énergie et de carbone.

Un pilier du projet Évap-eau

Les tours ont d’abord été installées dans le cadre du projet ÉVAP (2015), puis bonifiées dans ÉVAP2 (2020). Elles poursuivent aujourd’hui leur mission dans Évap-eau, devenant des outils incontournables pour comprendre comment l’aménagement forestier influence les cycles de l’eau et de l’énergie à l’échelle du paysage.

Outre les professeurs de la Faculté des sciences et de génie, plusieurs membres de la Faculté de foresterie, de géographie et de géomatique utilisent ces données, qu’il s’agisse de variables météorologiques (température, humidité, rayonnement solaire), hydrométéorologiques (évaporation) ou des flux de carbone. La Direction de la recherche forestière du ministère des Ressources naturelles et des Forêts s’intéresse notamment aux données liées à l’albédo, soit la part du rayonnement solaire réfléchi par la surface, car cela influence l’énergie disponible pour la croissance forestière.

16 mai 2025